L'homme est un dieu en ruine
Edward Beresford Todd, alias Teddy, a vingt ans quand éclate la Seconde Guerre. Fuyant la banque paternelle, il s'empresse de s'engager. Ce garçon tendre, amoureux de poésie et de nature, devient pilote de bombardier et affronte, pendant quatre ans, l'horreur des combats. Il fait preuve de bravoure et de lucidité, n'imaginant pas qu'un "après" soit possible. La paix revenue le laisse désemparé, un retour à la "normale" lui semble irréel. Il se glisse pourtant à nouveau dans la vie ordinaire, sans que le quitte un sentiment de culpabilité, le poussant à ne plus se fâcher ni à blesser personne.
Kate Atkinson poursuit dans ce roman la réflexion entamée dans "Une vie après l'autre" : qu'est-ce qu'être humain ? quels sont les scénarios possibles d'une vie ?
Son récit joue avec les temporalités, remet en question la réalité - n'y a-t-il pas plusieurs réalités ? -, ce qui donne un supplément de force à l'intrigue sans que le lecteur s'y perde. Elle nous raconte l'histoire de Teddy comme s'il était son meilleur ami, avec tendresse, humour et malice.
Le dimanche des mères
30 mars 1924, un dimanche, celui des mères. Une femme et un homme s'aiment dans une chambre. Jane Fairchild a 22 ans, Paul Sheringham en a 23. Elle est orpheline, ne connaît ni sa date de naissance ni son véritable nom; il est étudiant en droit. Elle est domestique, il est fils de bonne famille et près de faire un mariage de raison. Cette journée changera à jamais leurs vies.
Graham Swift possède l'art de l'épure, un style tout de finesse et d'élégance pour décrire la vie et ses possibles. Une pépite !
Parmi les loups et les bandits
Zou Lei est chinoise d'origine ouïghoure, fille unique d'un militaire, exilée involontaire et réfugiée aux U.S.A. Relâchée après une arrestation sommaire et un temps d'internement dont elle ignore la raison, elle tente de survivre sans papiers dans un New-York hostile. Elle y rencontre Brad Skinner, vétéran de la guerre d'Irak. Tous deux cherchent un abri, tous deux cherchent un refuge amical. L'amour qui finit par les lier aura cependant un adversaire de taille : leurs démons intérieurs.
Un roman beau, sombre et désespéré sur les ravages des guerres modernes, sur les laissés-pour-compte, peuple de l'ombre des métropoles rouleaux compresseurs, ces marginaux pour la plupart paumés et déglingués qui ne connaissent qu'un monde de violence.
Sacrifice
Le 6 octobre 1987 est une journée d'émoi pour les habitants de Pascayne, ville du New Jersey : Sybilla Frye, 15 ans, est retrouvée ligotée dans une usine désaffectée. Elle a été sévèrement battue, violée, recouverte d'excréments et de ces mots : "Pute nègre ku kux klann". D'abord muette, elle finit par avouer la culpabilité de cinq policiers blancs et sa peur face à leurs menaces de représailles. Dans cette ville où le racisme a de profondes racines, l'affaire est peu à peu étouffée. Jusqu'à ce qu'intervienne Marus Mudrich, révérend et activiste politique passionné, vaniteux autant qu' opportuniste, qui transforme l'horrible évènement en croisade vertueuse.
Un roman "coup de poing" qui décrit avec justesse le traumatisme, qui dénonce le racisme le plus primaire et pointe du doigt l'irresponsabilité des médias, la perte de valeurs. Un roman talentueux qui définit le sacrifice tant dans son acception positive que négative.
Comment Baptiste est mort
Baptiste a 14 ans quand il est enlevé avec ses parents et ses frères par un groupe de djihadistes. Il sont Français, donc coupables. Baptiste sera le seul à être libéré, le seul survivant. Le psychologue chargé de découvrir les faits, d'éclairer les nombreuses zones d'ombre, se heurte au silence de celui qui se fait désormais appeler Yumaï, ce guerrier reconstruit sur les cendres de Baptiste, un adolescent désormais froid et cruel.
Un roman épuré et glaçant qui décrit les effets pervers de la peur, les ravages de la déshumanisation terroriste et de l'irréversible endoctrinement.
"Ils ne m'ont pas libéré / ils m'ont enchaîné par quelque chose d'invisible / je suis encore avec eux / je ne suis plus le même / Baptiste est mort là-bas / il ne reviendra pas." p.47