Judas
Jérusalem, hiver 1959. Shmuel Asch, timide, émotif et désargenté, interrompt ses études et cherche un emploi. Une petite annonce l’amène à rencontrer Gershom Wald, 70 ans, handicapé et fantasque, qu’il est chargé de divertir de son intelligente conversation pendant quelques heures chaque jour. Elève brillant, Shmuel trouve en Wald un interlocuteur vif et incisif avec lequel il parlera de façon passionnée de la question arabe et des idéaux du sionisme. Il rencontrera surtout Atalia Abravanel, séduisante, libre et énigmatique, dont il devient amoureux fou.
Amos Oz est un conteur mélancolique, tendre, parfois ironique, à l’humour fin, habité par la grâce des mots, un artisan de génie des sentiments. Son roman est celui du tragique et de l'humain, de ce qu'il y a de tragique dans l'humain et de ce qu'il peut y avoir d'humain dans le tragique. Il y a là tout le panel des sentiments : la nostalgie, la solitude, l'amour, l’engagement, la trahison, le manque, l'amitié, la mort, le désir, le pardon. Il débusque les secrets de l'intime, l'intime politique comme l'intime amoureux. Tout se joue entre désir et peur, entre dépassement de soi et enracinement dans les certitudes. C'est un roman intimiste assez pessimiste qui se pose contre cette animalité archaïque que sont la haine et le fanatisme. Mais peut-on changer la nature humaine ? Comment faire du tumulte du monde si pas une paix tout au moins un compromis ?
L'archipel d'une autre vie
Le narrateur raconte sa rencontre avec Pavel. Il était orphelin de parents disparus dans les camps, du temps où les raisons importaient peu, et a atterri à Tougour, coin perdu de l'Extrême-Orient, avec quelques autres élèves, pour y être formé à la géodésie. Tout jeune, plein de sève, il est persuadé que ce sera là son meilleur printemps, le plus enivrant. Il l'a effectivement été mais pas de la façon dont il l'attendait. La rencontre avec Pavel qu'il suit à son insu, la vie que ce dernier lui raconte vont lui dévoiler le fond des choses, lui révéler la vie dans toute sa nudité, sa crudité, aussi sa joliesse.
Pavel est un soldat tête-de-turc qui se voit confier la mission de retrouver un fugitif. Ils sont cinq à le poursuivre, fiers et emplis de testostérone. Trop orgueilleux, trop sûrs d'eux, ils vont se faire avoir l'un à la suite de l'autre. La douleur morale en sera d'autant plus profonde que le fugitif s'avère être une femme. Pavel est partagé entre sa loyauté de soldat, l'occasion donnée de rentrer dans les bonnes grâces de ses autorités, et son désir de comprendre les raisons de la fuite de cette inconnue, de lui laisser une chance ...
Un roman cru et fort : les grands espaces, l'hiver qui s'abat impitoyablement, la confrontation avec une nature sans fard en contraste avec la nature humaine ... et l'envie de n'y être plus que soi, rien que soi, en vérité ...
L'autre qu'on adorait
Le roman s'ouvre sur le suicide de Thomas à l'aube de ses 40 ans. Une amie et sa toute jeune amoureuse le trouvent. La narration remonte ensuite le temps : nous sommes en 1986, Thomas a 17 ans, est plein de sève et s'engage dans tous les combats. Il est séduisant, séducteur, intelligent. Il brûle la vie par les deux bouts : il est de toutes les fêtes, sèche les cours, bouffe du cinéma, de la musique, s'enivre de tout, aussi de sexe. Une déception amoureuse et deux échecs en khâgne le décident à s'envoler pour les U.S.A. Les études l'ennuient mais il est passionné. Il réussit son master en Administration des Arts et trouve un job qui n'est pas à la hauteur de ses espérances. Il lui faut achever sa thèse sur Proust - un autre personnage clé du roman - pour atteindre ce qu'il désire. Il y échouera, enferré dans une spirale de dépressions qui le conduiront à être diagnostiqué bipolaire. Il est rassuré, voilà la cause de ses échecs, mais que reste-t-il de lui derrière la maladie ?
Un beau roman sur l'amitié à travers les ans, l'amour, le désir de se réaliser, la perte de soi ...
Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits
Le monde des hommes est de temps à autre visité par les jinns quand s'ouvrent des failles spatio-temporelles. Ils sont curieux de nous, de nos manières d'être, de nos sentiments, eux qui sont incapables d’émotions nobles, uniquement dévoués à du sexe compulsif. Dunia, la Princesse de la Foudre, Fée du Ciel, quitte le Peristan ( mot persan qui désigne le pays des Fées ) au XIIe siècle et rencontre Ibn Rushd ( le rationaliste Averroes ) pour lequel, à sa grande surprise, elle éprouve de l'amour. Elle lui offre une multiple descendance avant de repartir. Quand elle revient 9 siècles plus tard, elle constate que les jinns obscurs ont été poussés par Ghazali, radicaliste religieux et ennemi d'Ibn Rushd, à conquérir la terre, de façon impitoyable et dans un paroxysme de violence. Dunia va les combattre avec, à ses côtés, quatre de ses enfants et ce pendant mille et une nuits.
Un roman époustouflant, foisonnant et érudit, sans être alourdi de cette érudition. Il réunit tous les genres : historique, sentimental, philosophique, humoristique, d'aventures, encore d'anticipation ... Il mêle avec bonheur fable et réalisme magique avec une fantastique force de création et d'imagination. Il est à la fois dense et léger, à la narration riche en féeries, digressions, rêveries, considérations politiques et philosophiques. Un subtil enrobage pour nous parler des dangers de la montée des fondamentalismes religieux, des turbulences du monde que nous connaissons, du fanatisme religieux, des diverses menaces qui pèsent sur nous ( climatiques, politiques, idéologiques ).
Le Grand Jeu
La narratrice a acheté quelques hectares dans les montagnes et y a fait construire un refuge high-tech. Elle s'y installe et se fabrique une existence dans des conditions très difficiles, en totale autonomie. A l'abri, certes, mais de quoi ? et quel est son but ? Elle écrit et réfléchit sur le présent, l'attention, l'intention, l'identité, la vie ... Elle espère trouver, dans la nature sauvage et la solitude, des réponses aux questions qu'elle se pose. Une présence va bousculer la paix qu'elle cherche mais l'aider à trouver ces réponses : vivre, c'est quoi ? vivre, c'est oser; vivre, c'est se mettre en danger; vivre, c'est voir véritablement le monde; vivre, c'est affronter ses peurs pour ne plus avoir peur ...